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Corse-Matin 1998

 Corse-Matin 1998 (interview)


 

 

Corse-Matin, 1998

Michèle Castelli et La Veuve Blanche

 

Avec La Veuve Blanche,l'auteur, Michèle Castelli, originaire de l'Ile-Rousse, abandonne notre début de siècle évoqué avec ses deux excellents ouvrages : Marie di Lola et Rue Château-Payan.

Elle affronte ainsi le roman historique et ses chausse-trappes...disons tout de suite, et sans flatterie aucune, qu'elle y réussit aussi bien!Elle fait là revivre, avec beaucoup de talent, la vie dure et pleine de "tabous" qui fut celle de nos ancêtres. Rien n'y manque: la dureté des temps, la description de la vie villageoise avec ses règles strictes, la beauté des paysages, les rêves des deux cousines: Fiordispina et Anghjulina, et jusqu'à l'évocation de "Maroc", cette ville mythique où ziu Anton avait perdu sa liberté et laissé son rêve...Un rêve de "fée de harem" qu'il essaie de faire revivre en sa jolie petite fille.

En moins de deux cents pages, l'auteur nous fait revivre tous les garnds moments de la vie d'un village du début du XVIIIe siècle: naissances, communions,mariages, décès, élection du podestat, naissance d'une vendetta, l'intervention du paceru , le mariage a gran destinu , les amours aux conséquences terribles des deux héroïnes, les festivités, la mauresque, mais aussi la haine du génois, les entorses à la justice et même les honteux marchés d'esclaves maures vers Ostriconi ou les Isole d'Oro.

Avec Michèle Castelli, la poésie ne perd jamais ses droits et la féerie des couleurs, des paysages, des cieux changeants au gré des saisons expriment bien le romantisme, le rêve dont l'âme corse, éprise de beauté, rayonne depuis le début des temps. Un roman que l'on doit lire, car il nous apprend tant de choses sur la vie de nos aïeux.

Pierre COLOMBANI

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Corse-Matin, 7/1998

Conteuse d'histoires corses

Rencontre avec Michèle Castelli qui publie son troisième livre, La Veuve Blanche inspiré d'un fait divers

Michèle Castelli est l'auteur de deux ouvrages inspirés par l'histoire de sa famille: Marie di Lola (1982) et Rue Château-Payan (1985). La Veuve Blanche, son troisième livre raconte le tragique destin d'une jeune fille de Balagne, sur fond d'étude de moeurs en Corse au XVIIIe siècle.

-"Treize ans depuis votre dernier livre, c'est une longue gestation...

-Après Marie di Lola, qui s'inspirait de récits familiaux, j'ai eu envie d'écrire sur l'histoire de l'île. Alors je me suis plongée dans les archives, les livres, la documentation...Ca prend du temps! Il me fallait aussi trouver un sujet de récit, car je tenais à écrire sur la Corse au travers d'un roman.

-Il s'agit donc d'un roman historique?

-Je n'aime pas cette dénomination, car le livre comporte de longs passages sur la mentalité corse, produit de mes recherches historiques. Et puis je me base sur un fait réel.

"Chronique" d'un fait-divers survenu à Zilia

-La Veuve Blanche est une histoire vraie ?

-Au cours de mes recherches, je suis tombée sur une chronique du XIXe siècle, qui racontait un "fait-divers" survenu à Zilia. Sept lignes en tout! J'ai imaginé toute l'histoire à partir de là.

-Racontez-nous...

-En aucun cas! Les lecteurs connaîtraient la fin du livre avant de commencer...Ce que je peux vous dire, c'est que l'héroïne tombe amoureuse d'un berger, qui se révolte contre les Génois et l'abandonne au village. Je n'ai d'ailleurs pas situé l'histoire à Zilia, mais dans un village de Haute-Balagne.

-Tilia, c'est quand même assez proche de Zilia...

-C'est vrai, je n'ai changé qu'une lettre! Mais il pourrait aussi bien s'agir de San-Antoninu ou de Speloncato ou de n'importe quel village perché sur les montagnes.

-Qui a inspiré vos personnages ?

-La jeune fille est le pur produit de mon imagination. Mais pour le grand-père revenu sur l'île après avoir été vendu comme esclave au Maroc, je me suis basé sur le récit d'unmédecin qui a soigné pendant des années une princesse marocaine.

-Pourquoi cette passion pour le XVIIIe siècle ?

-Pour la Corse, c'est une période de transition,de glissement. La domination génoise était de plus en plus contestée, et beaucoup s'engageaient dans une lutte armée contre les "colonisateurs". Puis l'île a connu son unique période d'indépendance, sous la conduite de Pascal Paoli. Le roman s'achève juste avant le départ des Génois, et montre la prise de conscience du peuple corse. Je suis fascinée par ces périodes où l'histoire avance.

La place de la femme qui conduit au drame...

-Qu'est-ce qui caractérise cette mentalité corse que vous évoquez?

-A cette époque, les villages fonctionnent comme des communautés, où toutes les décisions sont votées. Cette modernité s'oppose à un état d'esprit quasiment moyenâgeux sur la place de la femme, qui conduit au drame de la jeune fille. Voilà pourquoi je voulais étudier les mentalités et les rendre au travers d'un roman.

-Etes-vous lue sur le continent?

-J'ai vu un jour mon livre à la FNAC, à Paris, ça m'a fait très plaisir! Mais ce qui compte énormément pour moi, c'est de savoir que beaucoup d'Ile-Roussiens ont Marie di Lola qui raconte l'histoire de leur ville au début du siècle.

 

Propos recueillis par Thomas PROUTEAU

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